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FRANCISCO SPINOLA – WSL

Francisco Spinola est le « Monsieur surf » du Portugal. Avec son associé Frederico Teixeira, ils sont à l’initiative du circuit de compétition de surf portugais. Ce qui n’était qu’une industrie de niche devient alors un levier majeur d’attractivité touristique et économique. Ecoles de surf, surf camps, hôtels, restaurants se multiplient attirant l’attention de la scène surf internationale.

À la tête de la Word Surf League en Europe, il œuvre, tout comme EUROSIMA, en collaboration avec son Président Jean-Louis Rodrigues, au développement du surf, de ses athlètes et de la filière glisse, et s’attache à organiser des événements sur les meilleurs spots et les plus belles vagues d’Europe.

Francisco, où es-tu né ?

Je suis né et j’ai grandi au Portugal. Je surfe depuis tout petit et j’ai fait un peu de compétition, dont quelques Pro Juniors en Europe quand j’étais plus jeune. Mais j’ai fini par réaliser que je ne serais jamais le meilleur surfeur, alors j’ai fait des études. Pour être honnête, quand j’ai commencé mes études et mon MBA, je n’avais jamais imaginé que je pourrais travailler dans l’industrie du surf, parce qu’il y a 20 ans au Portugal, ça n’était pas assez développé pour faire carrière.

Comment as-tu réussi à transformer cette passion en carrière professionnelle ?

J’ai étudié à Sydney, en Australie, pendant deux ans et j’ai obtenu un MBA. Je suis ensuite revenu en Europe, j’ai travaillé en Allemagne, puis j’ai rejoint Rip Curl en 2007 au service marketing.

De là, j’ai commencé à collaborer avec l’ASP ; mon équipe et moi avions suggéré à Rip Curl International d’organiser le Rip Curl Pro Search à Peniche. Ça a été une belle réussite cette année-là, l’ASP nous a donc accordé une licence permanente et nous avons fini par gérer cet événement pendant dix ans d’affilée, d’abord avec Rip Curl, puis avec Ocean Events.

Tu as créé ton agence Ocean Events en 2012. Quelle est l’histoire de ton entreprise ?

Mon associé et moi avons organisé des événements pendant quelques années avec Rip Curl comme sponsor principal. Ensuite, nous avons travaillé directement avec la World Surf League pendant plusieurs années, en gérant des événements au Portugal. Nous avons prouvé à un grand nombre d’acteurs que le surf pouvait être un axe porteur pour de grandes marques hors surf.

Nous nous sommes évidemment appuyés sur notre marque principale, Rip Curl, mais nous avons ensuite réussi à faire appel à deux des plus grandes entreprises nationales portugaises, Electricity of Portugal et Meo Altice. Très vite, l’office de tourisme Turismo Portugal et le gouvernement portugais ont réalisé que ce sport pouvait vraiment apporter une valeur économique en régions.

Quelle est ta plus grande satisfaction ?

Quand j’ai commencé, nous avons pratiquement construit le circuit des compétitions de surf et l’écosystème du surf au Portugal avec des événements comme le Rip Curl Pro Search à Peniche et d’autres du même genre. Par exemple, le président de Turismo Portugal et d’autres personnes comme le maire de Peniche ont convenu qu’il y avait eu un Peniche avant et après le Rip Curl Pro Search.

De nombreux hôtels ont été rénovés, de nouveaux hôtels ont été construits, dont certains hôtels 5 étoiles, mais aussi de nouveaux surf camps et des écoles de surf tout autour. Ça a vraiment eu un impact économique important sur la région, qui n’est pas très riche. Le tourisme y était très saisonnier et maintenant, grâce au surf, il est actif à peu près toute l’année.

Tu travailles également pour la WSL depuis l’an dernier, quelles sont tes fonctions ?

Je suis le Directeur Général de la WSL pour l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique.

 » C’est une mission assez complexe car chaque pays est différent avec des cultures et langues différentes, donc d’après moi c’est très important de travailler avec les locaux. C’est la clé d’un évènement réussi car les locaux sont ceux qui sont en lien avec les décideurs et les institutions territoriales. « 

Je pense que c’est pour ça qu’ils m’ont choisi, car je collaborais depuis longtemps avec la WSL et l’ASP, que je savais ce que c’est que d’être du côté des licenciés et aussi car j’ai l’expérience du terrain. Globalement, mon rôle pour les évènements est d’assurer la liaison avec les équipes locales et d’être le plus utile et efficace possible en tant que lien avec le siège.

Sur le terrain, il y a des personnes chargées de gérer l’événement. Ce n’est pas nous. Cela n’aurait pas de sens qu’une personne d’un autre pays vienne et commence à faire ces tâches clés. Ce que nous devons faire, c’est surtout veiller à ce que tous nos événements appliquent plus ou moins le même modèle que celui que nous appliquons au Portugal, qui est un modèle qui fonctionne.

Peux-tu nous expliquer les évolutions majeures du circuit WSL pour la prochaine saison ?

En gros, nous avons décidé de conserver la WSL comme une ligue, mais avec une grande finale. Et pourquoi avons-nous décidé de faire ça ? Parce que la finale de l’an dernier qui opposait le surfeur numéro un, Italo (Ferreira), au surfeur numéro deux, Gabriel (Medina), était la toute dernière manche de l’année ; le public y était très nombreux. Il nous semblait donc évident que les gens voulaient voir ça plus souvent. En appliquant ces changements, nous espérons que cela créera un plus grand engouement autour du tour, tout au long de l’année.

Pour ce faire, nous avons divisé l’année pour que le Championship Tour (CT) commence en janvier et se termine vers le mois d’août. Ensuite, il y aura une grande finale pour déterminer qui sera le champion.

La deuxième partie de l’année, nous allons créer les Challenger Series (anciennement QS 10000) de septembre à décembre afin de qualifier les surfeurs pour la prochaine saison du CT.

Les Qualifying Series (QS) seront donc plus régionales, plus particulièrement l’an prochain, notamment en raison de l’instabilité sanitaire due au virus et des restrictions de voyage, etc.

Que penses-tu de la disparition de l’épreuve d’Hossegor ?

Nous savions qu’en faisant ce changement et en ne disposant pas des mois de septembre, octobre ou novembre pour le circuit CT, cela exclurait l’Europe de ce tour car c’est la meilleure période pour organiser des compétitions en Europe. Dans ce cas, j’ai dû retirer ma casquette européenne et penser à ce qui était le mieux pour la WSL.

Au Portugal, nous avons réussi à garder un CT car les vagues en février restent satisfaisantes malgré le froid et les conditions hivernales. D’ailleurs, les vagues peuvent y être vraiment bonnes et il n’y fait pas aussi froid qu’en France.

Pour la France, cela aurait été impossible d’avoir un CT en février. On le sait tous, cela serait très risqué de faire une compétition en France à cette période de l’année à cause des grosses tempêtes et du froid. Ayant cela en tête, nous avons donc créé les Challenger Series spécialement pour palier à ce type de situation. Il n’y aura pas de CT mais l’option d’un Challenger pourrait être parfaite pour la France.

Comment vois-tu l’avenir du Tour en Europe ?

Nous avons créé les Challenger Series pour être des événements forts et nous allons certainement en organiser en France. Nous savons qu’avec ce format nous aurons probablement 80% des surfeurs du CT qui viendront aussi sur les Challengers. Particulièrement si nous garantissons à ces compétiteurs de très bonnes conditions et un bel accueil, surtout pour ceux qui ne veulent pas faire de breaks de compétitions pendant 6 mois. On est certains que nombreux de ces grands noms viendront sur les Challenger Series.

Soyons réalistes, la France est le plus grand marché du surf en Europe, elle l’a toujours été et elle le restera. Pour garder une stratégie européenne solide, nous avons besoin d’événements, de marques et de surfeurs français forts. Il en va de même pour l’Espagne et le Portugal.

Nous travaillons pour que ça devienne, comme par le passé, un tour européen fort. Bien sûr, nous travaillons aussi avec des partenaires en Angleterre, en Irlande et en Écosse, où l’on trouve aussi de très bonnes vagues et de bons surfeurs.

Nous espérons donc créer une sorte de deuxième ligue qui augmentera notre base de fans dans ces régions et renforcera l’engagement des sponsors locaux avec plus de surfeurs européens sur ces compétitions. Nous sommes convaincus que ces Challengers peuvent représenter une très belle opportunité.

Tu es très investi dans la dynamique événementielle au Portugal, comment vois-tu l’avenir du circuit là-bas (épreuves QS, CT et surf de gros) ?

Le Portugal se porte très bien. Nous avons toutes sortes d’événements, du Pro Juniors au QS 10 000 (les Challenger Series), en passant par le CT et même une étape du Big Wave Tour à Nazaré. Ça attire particulièrement l’attention sur l’univers surf. Mais pour la prochaine saison, le CT sera un évènement d’un autre genre. À la place d’une ambiance estivale, ça sera un évènement hivernal. Je pense que les vagues pourraient être vraiment bonnes et c’est ce qui compte le plus. À mon avis les vagues seront au rendez-vous en février.

En séparant les Challengers Series du CT (les Challengers resteront en octobre), on aura un programme de Challengers en deux stops : France et Portugal. C’est super simple car le Portugal est juste à côté, seulement 7 heures de voiture depuis la France, c’est rien ! Les surfeurs viendraient du monde entier, ils surfent en France entre la fin d’été et le début de l’automne puis descendent au Portugal. L’idée pour tous ces surfeurs serait de suivre les côtes du Portugal au Maroc. Il faut bien sûr mettre l’Espagne dans le programme, car c’est tout simplement logique d’établir un lien vraiment fort entre la France, l’Espagne et le Portugal. C’est notre plan à long terme, bien sûr.

Que penses-tu du développement du surf en piscine à vagues ?

Je pense que c’est génial !

Plus on a de vagues artificielles, mieux c’est. Cela développera le surf à des endroits où il n’y a pas de vagues, mais on ne pourra pas rivaliser avec le plaisir d’être dans l’océan. Ça amènera probablement plus de surfeurs sur nos côtes puisqu’ils voudront découvrir le surf en milieu naturel. Il y a de très bonnes vagues artificielles donc c’est un bon équilibre.

Pour l’instant, cela ne semble pas être une priorité au Portugal. Les entreprises développant les piscines à vagues semblent aussi préférer les construire près de grandes villes où le surf n’est pas accessible, notamment en Espagne ou en Allemagne… Ces pays ayant une forte concentration de surfeurs voyageurs et peu de spots de surf, cela semblerait plus opportun.

Comment vois-tu l’arrivée du surf aux Jeux Olympiques ?

J’ai toujours pensé que c’était vraiment génial. Devenir un sport olympique, c’est une reconnaissance pour le surf. Cela place le surf au plus haut niveau, au même titre que les autres sports. Je suis sûr que tous les athlètes seront très heureux d’être aux Jeux Olympiques et de participer à l’esprit olympique. Je pense que c’est un atout pour notre sport. Je suis certain que cela nous donnera plus de visibilité et attirera plus de gens vers la World Surf League, pour suivre les athlètes qu’ils auront découverts pendant les Jeux Olympiques.

D’un point de vue très personnel, je suis curieux.

D’abord parce que notre sport est très sensible au temps, aux marées et à la houle : c’est très difficile de planifier à l’avance. Je ne suis pas sûr que les comités d’organisation des Jeux Olympiques soient prêts à s’adapter à la flexibilité des marées, des vents… Dans notre sport, nous ne pouvons pas avoir un programme précis, tout change tous les jours et c’est ce qui fait la beauté du surf.

Deuxièmement, si on observe les autres sports olympiques et notamment les sports ayant des ligues majeures, on se rend compte que les Jeux Olympiques ne sont pas si forts, à mon avis.

Par exemple, l’ATP étant une ligue très forte, je ne connais pas forcément le nom du champion olympique de tennis. De même, la NBA étant tellement forte, je ne connais pas non plus les champions olympiques de basket-ball.

Les gens sont tentés de suivre le golf car la PGA et les circuits européens sont très reconnus. Donc, lorsque vous avez, tout au long de l’année, des événements de ligues très puissantes, les sports olympiques prennent des perspectives différentes (je ne dis pas qu’ils ne sont pas importants).

Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour l’avenir ?

Je suis très optimiste quant à l’avenir du surf. Je vois de plus en plus de jeunes et de filles dans l’eau, et c’est exactement ce dont nous avons besoin ! Et puis l’économie a toujours des hauts et des bas, mais tant qu’il y a de jeunes surfeurs à l’eau, avec le sourire et heureux de surfer, on sait que le surf existera toujours.

WSL :  Website / Facebook / Instagram

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Interview : Stéphanie Godin & Zoë Zadouroff

Photos : SaltyCom

1 commentaire

  1. Romain BRUNET dit

    Bullshit les explications pour la qualité du surf en France vs Portugal en Février, c’est la même…
    C’est un peu trop facile.
    Je pense que le monsieur à bien su défendre son pays auprès de la WSL et il aurait eu tord de ne pas le faire.
    Cela pose donc aussi le constat du pouvoir d’influence de notre fédération auprès de la WSL.

    J’aime

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